ANNE CUNEO

CONVERSATIONS CHEZ LES BLANC

(à propos d’Anne-Marie Blanc, comédienne)
2009. 312 pages, avec de nombreuses illustrations. Épuisé.
ISBN 978-2-88241-244-7
© version allemande et autres langues que le français :
«Gespräche im Hause Blanc
(über Anne-Marie Blanc, Schauspielerin)»
Traduit par Erich Liebi
© 2009 Zürich: Römerhof Verlag


Biographie

Vous pouvez nous commander directement cet ouvrage par courriel.


Anne-Marie Blanc, grande dame du théâtre et du cinéma suisses

Les francophones connaissent mal Anne-Marie Blanc. Paradoxe, cette vedette du théâtre et du cinéma suisses était pourtant francophone. Il faut dire que, dès son adolescence, elle avait déménagé d’abord à Berne, puis à Zurich, et c’est en Suisse alémanique puis en Allemagne qu’elle est devenue une véritable star.
D’elle, les Romands connaissent surtout son rôle dans le film Gilberte de Courgenay, qui date de 1941. Elle était née à Vevey le 2 septembre 1919, elle était la fille du responsable du registre foncier et la petite-fille d’une personnalité légendaire de la région, Henri Blanc, à la fois préfet du district de Vevey et vigneron. Parmi ses ancêtres, on comptait également un conseiller fédéral.
Elle est morte en février 2009, elle allait avoir quatre-vingt-dix ans. Je l’ai fréquentée pendant un quart de siècle et je peux affirmer une chose d’elle avec certitude: c’était à la fois une star (il suffisait de se promener dans la rue avec elle pour s’en apercevoir), et une femme de bon sens qui ne se prenait pas pour la vedette qu’elle était.
Les bribes de son passé qu’elle m’avait racontées m’avaient donné, il y a longtemps déjà, envie d’écrire sa vie, et comme elle prétendait «ne pas savoir écrire», je lui avais suggéré de me dicter ses mémoires. Elle n’avait pas voulu. Je n’avais jamais abandonné le projet, et j’ai fini par lui proposer de faire sur elle un documentaire filmé. L’idée lui a plu, et le documentaire a été réalisé. Il s’intitule La Petite Gilberte: Anne-Marie Blanc, comédienne.
Depuis quelques années, elle ne jouait plus, et, petit à petit, elle s’était réconciliée avec l’idée que j’écrive un récit de sa vie. Elle m’a fait demander par un de ses fils si je serais d’accord. J’ai dit oui, j’ai commencé.
Et puis elle est morte. Ç’a été un coup dur, à la fois parce que je l’aimais beaucoup et parce qu’il me semblait impossible de travailler sans elle.
Ce que j’ai fini par écrire, ce n’est pas tant une biographie que l’histoire de notre amitié, dont fait partie, entre autres, le récit qu’elle m’a fait de sa vie.

ANNE CUNEO

Haut de la page

«Anne-Marie Blanc est ma beautiful maman»

Une star en Suisse alémanique, mais une quasi-inconnue en terre romande. Il faut lire le livre d’Anne Cuneo pour comprendre l’incroyable et longue carrière qu’Anne-Marie Blanc, celle qui restera à jamais la Gilberte de Courgenay, a menée outre-Sarine. Née à Vevey, au lendemain de la Grande Guerre, c’est à Berne qu’elle passe son adolescence. Comme elle est douée pour le théâtre, elle décide d’en faire son métier. Avec un bel aplomb, elle entre au Schauspielhaus de Zurich. Plus tard, mariée et mère de trois enfants, la comédienne poursuit, sans jamais l’interrompre, sa carrière théâtrale et cinématographique en Suisse et à l’étranger. Rétrospectivement, elle fait figure de pionnière. «Complètement, mais sans avoir jamais rien théorisé», souligne Anne Cuneo dans le livre-hommage qu’elle consacre à la comédienne décédée en février dernier et qui aurait eu quatre-vingt-dix ans en ce mois de septembre.

Vous ne voulez pas qu’on parle d’une biographie, alors comment faut-il qualifier votre nouveau livre?
C’est une histoire, tout simplement, mais une histoire vraie. Les trois fils d’Anne-Marie m’ont demandé d’écrire ce livre sur leur mère. Ils voulaient en faire cadeau à leur mère pour ses quatre-vingt-dix ans. J’ai accepté à condition que ce soit lié à la relation que j’avais avec elle, qu’ils n’interviennent pas sur mon texte et surtout qu’Anne-Marie soit d’accord. Elle a accepté le principe, mais elle est décédée avant que le projet aboutisse.

Quelle relation aviez-vous avec Anne-Marie Blanc?
Anne-Marie était ma beautiful maman. Elle m’a adoptée. Elle s’est occupée de moi autant que je me suis occupée d’elle. Je l’ai rencontrée à Zurich en 1985, au cours d’une lecture publique. Je crois qu’à l’époque elle avait un grand besoin de francophonie et c’est ce qui l’attirait chez moi au début. Je l’ai interviewée très souvent, j’ai réalisé un documentaire sur elle et je lui ai aussi écrit une pièce de théâtre, parce qu’elle voulait au moins jouer une fois en français et qu’elle ne trouvait pas de rôle dans le répertoire.

Il me semble que ce soit elle qui vous ait poussée à écrire des romans.
En fait, c’est quelque chose que j’avais déjà en moi, mais elle m’a secouée. À cette époque, mon existence était assez compliquée par rapport à la sienne. Elle m’a fait me remettre en question en m’obligeant, à cinquante ans, à repenser ma vie.

M.M.S., Générations Plus

Haut de la page

Un hommage

Souvenirs d’une amie


En juin 1989, lorsque le Théâtre populaire romand crée Madame Paradis, c’est la première fois qu’Anne Cuneo voit une de ses pièces montée dans un théâtre officiel; c’est aussi la première fois qu’Anne-Marie Blanc joue en français. Bien que Romande, la comédienne décédée en février dernier a en effet effectué l’essentiel de sa carrière théâtrale à Zurich, où elle a longtemps été en contrat avec le Schauspielhaus. C’est lors de leur première rencontre, en 1984, qu’Anne Cuneo, face à une Anne-Marie Blanc regrettant la rareté des bons rôles pour une femme de 65 ans, lui a dit qu’elle lui écrirait un texte sur mesure…
«Les Mémoires, c’est du sensationnalisme déguisé en littérature», disait celle qui est devenue une star du cinéma suisse, en 1941, avec Gilberte de Courgenay. Le livre que publie ces jours Anne Cuneo, après avoir déjà consacré un documentaire à la comédienne, n’est donc pas une biographie stricto senso, mais un vibrant hommage, un récit de vie placé sous le signe de l’amitié et où l’on peut lire de belles évocations du théâtre et du cinéma des années 40-50. Passionnant.

STÉPHANE GOBBO, La Liberté

Haut de la page

Le coup de cœur de L’Hebdo
Conversations chez les Blanc

Quelle belle rencontre à laquelle nous convie Anne Cuneo! Durant un quart de siècle, l’écrivain a été l’amie de la feue comédienne suisse Anne-Marie Blanc, née à Vevey en 1919, pilier du Schauspielhaus de Zurich, devenue star dans les années quarante grâce au film Gilberte de Courgenay. Une amitié prédestinée: à l’âge de dix ans, Anne Cuneo tombe amoureuse du personnage de Mademoiselle Paradis dans le film Marie-Louise – sans se douter, à leur première rencontre, en 1984 à Zurich, qu’elle l’a devant elle en chair et en os! Elle écrira du coup pour Anne-Marie la pièce Madame Paradis, montée par Charles Joris et le TPR. À travers ces Conversations tantôt badines, tantôt graves, Anne Cuneo raconte un itinéraire de femme artiste libre et forte, y superpose le sien, et la manière dont leurs vies respectives se sont croisées et souvent imbriquées. Fluide, ému, vivant, ce témoignage rend hommage à une héroïne de la culture suisse qui n’a jamais cessé d’être populaire.

ISABELLE FALCONNIER, L’Hebdo, Sélection Payot

Haut de la page

Le cas Anne-Marie Blanc

Nous, Romands, sommes en général assez sûrs que les Alémaniques nous tiennent pour quantité négligeable et sont peu ouverts à nos talents, alors qu’on ne compte plus les Alémaniques ayant construit chez nous un succès (inter)national. Tenez, rien que dans la petite ville de Carouge, il y eut Christa (de) et Roger Pfund…
Un contre-exemple littéralement spectaculaire? La vie, l’œuvre et la stature d’Anne-Marie Blanc: la Veveysanne, authentique star en Suisse alémanique, demeura totalement ignorée au pays natal. Une série de projections à la Cinémathèque et un livre séduisant saluent la grande dame, décédée en février dernier, qui aurait eu nonante ans le 2 septembre.
Pilier du Schauspielhaus de Zurich, vedette cinématographique (elle refusa un contrat de sept ans à Hollywood pour ne pas quitter mari et enfants), elle joua à Paris mais ne fut jamais appelée en Suisse romande, pas même par son frère, le dramaturge et homme de radio Géo Blanc!
Montée par le Théâtre populaire romand, la pièce qu’Anne Cuneo écrivit pour elle, Madame Paradis, fut le seul rôle que tint jamais dans sa langue maternelle cette titulaire de l’Anneau Reinhart…
Voilà qui manifeste un extraordinaire cloisonnement, en dépit des discours sur le dialogue confédéral et la multiculturalité. L’autre jour encore, à la mention d’Anne-Marie Blanc, adulée pour son rôle dans Gilberte de Courgenay, un Jurassien séparatiste et cultivé n’eut qu’une réaction de rejet: patriotisme contre patriotisme, ce film de 1941, célébrissime pendant et après la guerre, lui évoque toujours un Jura «occupé» par la soldatesque alémanique, et une jolie Gilberte quasi-collabo… Alors que la jeune Jurassienne incarnait l’esprit d’indépendance de la Suisse: l’âme de la résistance était romande, c’était Gilberte qui galvanisait le courage des militaires…
Il faut voir, avec l’œil d’aujourd’hui, les films d’Anne-Marie Blanc pour constater la richesse et la force du cinéma suisse de ces années-là. Une qualité due en partie à des réfugiés politiques que la Suisse, pourtant isolée, n’avait pas réduits à la stérilité en les empêchant de travailler. Et encore moins coffrés pour faire plaisir à une puissance étrangère.
[…] Anne-Marie Blanc était si connue pour son rôle fétiche que pendant des décennies des anciens de la Mob l’arrêtaient dans la rue pour la féliciter en l’appelant Gilberte. Pas étonnant qu’Anne Cuneo ait intitulé La petite Gilberte – Anne-Marie Blanc, comédienne le documentaire qu’elle a tourné avec elle en 2001.
L’expérience a nourri Conversation chez les Blanc, ni biographie ni hagiographie, mais récit attachant et critique d’une vie à travers une amitié, qu’Anne Cuneo vient de publier (Bernard Campiche Éditeur).
L’écrivaine et journaliste romande de Zurich, qui honore ce journal d’une chronique mensuelle, continue ainsi à jeter des ponts sur la Sarine. Entre des peuples confédérés qui s’appauvrissent en se méconnaissant.

JACQUES POGET, 24 Heures

Haut de la page

«En tant que biographe, Anne Cuneo aurait pu être une hypothèque, mais en fait, elle est bien. L'auteur et cinéaste née à Paris de parents italiens a rencontré Mme Blanc pour la première fois en 1984, à la première de Silence en coulisse de Michael Frayn, au Schauspielhaus de Zurich. Par la suite, Blanc et Cuneo sont devenues très amies. Avec Madame Paradis, l'auteur a écrit un rôle sur mesure pour la comédienne. Il n'y a pas trace de flatterie, de cannibalisation ou de narcissisme. Ce qui est central, c'est l'effort de l'auteur pour décortiquer la personnalité et le travail de Mme Blanc. […] Cuneo prête une attention particulière au développement artistique de Blanc. L'image qui se cristallise grâce aux exemples rapportés est celle d'une comédienne sérieuse et modeste - une star de proximité, une incarnation du professionalisme. […] Lorsque Anne Cuneo a demandé à occuper la scène du Schauspielhaus pendant quelques heures pour son documentaire sur Anne-Marie Blanc en 2001, on lui a répondu: «Il n'est pas question que cette vieille peau mette le pied sur notre scène.» Anne Cuneo a insisté - et lorsque finalement on lui a cédé la scène pendant quelques heures, on a soudain vu paraître de nombreux collègues d'autrefois, des techniciens qui voulaient que la grande dame puisse jouir d'un éclairage parfait, une manière de lui faire honneur une dernière fois. Exactement comme le fait Anne Cuneo dans sa biographie «Conversation chez les Blanc».

HNAS JÜRG ZINSLI, Berner Zeitung

Haut de la page

L’œil d’Anne Cuneo sur Anne-Marie Blanc

La force et la beauté d’une vocation de comédienne qui a marqué les planches et les plateaux de Suisse sous le regard généreux de la romancière Anne Cuneo
Dans un livre généreux qui est aussi l’histoire d’une amitié, Anne Cuneo retrace la belle carrière de la comédienne Anne-Marie Blanc, au nom romand et de langue maternelle française, mais qui a fait carrière en Suisse alémanique, notamment au Schauspielhaus de Zurich, ville qu’elle a habitée de l’adolescence à sa mort en 2009, à près de 90 ans, quelques mois avant la parution du livre (également publié en allemand). De ce côté de la Sarine, Anne-Marie Blanc reste dans les mémoires pour avoir incarné et ainsi mythifié Gilberte de Courgenay, dans un film datant de 1941. Le livre d’Anne Cuneo donne sa véritable dimension à cette comédienne aussi modeste que douée. Elle a «endossé» au théâtre, sur nombre de scènes prestigieuses germanophones, des grands rôles classiques féminins, à tous les âges, et tourné dans un grand nombre de films, notamment avec Daniel Schmid (Violanta). Ce texte exprime, mémoire et sentiments à l’appui, la force et la beauté d’une vocation.

JEAN-BERNARD VUILLÈME, Le Temps

Haut de la page

«Raconter? Mais c’est  faire plaisir!»

Anne Cuneo est l’un des auteurs les plus lus en Suisse. Écrivain, cinéaste, journaliste, elle nous fait découvrir des mondes et retrouver des personnages perdus dans les siècles. Rencontre.

Coopération. Comment définissez-vous ce que vous faites?
Anne Cuneo
. Je suis écrivain de romans, de théâtre et de cinéma, journaliste d’actualité et cinéaste.

Mais en fait, qu’est-ce être une femme écrivain et cinéaste?
Je n’aurais jamais écrit autant si je ne m’étais pas heurtée dans ma jeunesse à l’impossibilité de faire du cinéma. Dans les années 1960 en Suisse, on ne donnait pas d’argent aux femmes pour faire des films! Le théâtre était aussi un métier d’homme. Finalement, chez nous, il n’y a que trois cents ans que les femmes peuvent monter sur scène, avant c’était les hommes qui jouaient leurs rôles. Quand j’ai voulu mettre en scène il y a vingt-cinq ans une pièce de Duras avec Anne- Marie Blanc au Schauspielhaus de Zurich, on m’a ri au nez alors que maintenant cette institution est dirigée par une femme. Les temps ont changé!

Ce qui vous tient à cœur dans votre  travail?
Je souhaite avant tout raconter de belles histoires, que cela soit en deux minutes, sur une page de blog ou sur cinq cents pages. C’est comme cela depuis toujours. Je suis née accompagnée d’histoires.

Qu’est-ce qui peut jouer le rôle d’étincelle?
Cela peut partir de l’actualité, d’une lecture, du hasard, les histoires sont comme des allumettes qui attendent l’étincelle. Il faut que cela soit spontané, qu’il y ait quelque chose qui fasse tilt.

Et pour votre dernier livre?
Conversations chez les Blanc
est particulier parce que c’est une commande sur la grande comédienne Anne-Marie Blanc. J’aimais vraiment cette femme, c’était une amie et j’y raconte nos vies sous la forme de biographies croisées, mais ce n’est pas un projet aussi personnel qu’un roman.

Quel genre de personnages vous intéresse?
Ceux qui ne se sont pas conformés à leur époque, qui ont fait quelque chose de différent, m’intéressent beaucoup. Ils ont entraîné une évolution capitale mais tout le monde les a oubliés. C’était très marquant avec Augereau, le personnage principal du Maître de Garamond. Au XVIe siècle, on a détruit sa maison, son atelier, il a été brûlé comme hérétique et jusqu’à son nom a été banni. Raconter son histoire est un travail d’historien, mais finalement l’historien est le journaliste du passé. Quand j’ai fini ce livre, je me suis dit que j’avais rétabli une justice.

Et pour votre fameux roman Le  Trajet d’une rivière?
J’ai lu d’un prêtre catholique qui vivait à Londres en 1600 cette phrase admirable: «Nous avons tous le même Dieu. Mais certains le prient à l’église, d’autres le prient au temple. Quelle importance, du moment qu’on le prie!»

Qu’en avez-vous fait, de cette phrase?
En langage laïque, j’interpréterais ainsi: «Nous avons tous le même but: être heureux. Quelle importance dans quel système, pourvu qu’on travaille à être heureux.» Dans Le Trajet d’une rivière, j’ai vu des parallèles directs entre le monde européen divisé entre catholicisme et protestantisme et le monde entier divisé entre capitalisme et communisme.

Cette idée, comment s’exprime- t-elle dans votre roman?
Le personnage principal n’arrive pas à choisir entre les deux religions et trouve ridicule l’extrême d’un côté comme de l’autre. Il choisit donc de s’exprimer en musique qui est le langage des deux. Il prône la tolérance!

Vous êtes un des auteurs les plus  lus en Suisse, qu’est-ce que cela  implique pour vous?
Je suis peut-être un des auteurs les plus lus mais aussi un des plus ignorés sur le plan de la critique. C’est quelque chose que je n’ai jamais compris et qui m’a fait la vie dure parfois. Certains me reprochent de faire des romans à l’eau de rose ou des romans de gare car, au sens où la critique l’entend souvent, je ne suis pas une intellectuelle. Pour moi, raconter des histoires aux lecteurs, c’est les faire réfléchir mais aussi leur faire plaisir. J’ai une chance extraordinaire car mes bouquins ont réussi à se vendre d’eux-mêmes. Ils sont même traduits en plusieurs langues.

Vos projets?
Je me prépare à écrire au moins trois romans. Si on me propose un film, je le réalise volontiers car je suis aussi cinéaste et j’ai fait autant de films que de romans. J’ai aussi le projet de faire tout autre chose; mais cela porte toujours malheur d’en parler trop tôt. Patience!

SOPHIE EIGENMANN, Coopération




Haut de la page