NADINE RICHON

CROIS-MOI, JE MENS

Roman
2014. 176 pages. Prix CHF 31.–
ISBN 978-2-88241-379-6



Biographie

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Crois-moi, je mens est une arnaque amoureuse tissée sur la toile. Elle met en scène deux personnages que tout sépare: l’âge, la fortune, le statut social. Violette a 60 ans; elle est secrétaire au chômage. Elle se sent comme «une erreur de signalisation, un cheveu sur la soupe, une ombre au tableau.» Elle se plaît à admirer la photo de Garry Cooper «en polo blanc, les cheveux gominés, qui caresse trois chiens minuscules.» Elle vit par procuration. Et puis, il y a Antonio, le beau Sicilien qui lui fera oublier les brumes de la Belgique. Elle l’a rencontré sur la toile. Avant de la rejoindre, il a décidé de faire un saut à Kuala Lumpur en Malaisie. Bêtement, il tombe malade. Violette paie une opération coûteuse. Elle ne veut pas perdre son homme!
À Genève vit Catherine, blonde, élancée, pulpeuse «bien installée dans son confort.» Historienne de l’art, elle a la cinquantaine éblouissante. Mariée, elle a un ami sur le web: Mike, un veuf qui dirige une entreprise spécialisée dans le domaine des routes. Il reçoit un mandat pour Kuala Lumpur mais avant de s’y rendre, il promet à Catherine de faire un crochet par Rome pour la voir.
Derrière Mike et Antonio, il y a un homme de 24 ans: Jordan, catapulté en Malaisie depuis son Afrique natale. Jeune maestro du web, c’est lui qui tire les ficelles. Il piège les femmes en leur envoyant des poèmes ou des chansons.
Il faut compter encore avec Alexandre-Sacha, l’acteur de porno qui souhaite se racheter une moralité. Il fait l’acquisition d’un café au bord de l’eau. Le détail est à retenir!
Le sujet est d’actualité! Subtilement, Nadine Richon noue la trame de son récit, introduisant des personnages qui le feront progresser jusqu’à un dénouement inattendu.
Née à Sao Paulo au Brésil. l’auteur a étudié la sociologie à l’Université de Lausanne. Elle y vit et travaille en tant que journaliste. Elle a nourri son histoire de citations de films, de phrases extraites des livres qu’elle a lus, témoignant de sa vaste culture. Crois-moi, je mens nous tient en haleine jusqu’à son épilogue. Il est édité par les éditions Campiche. Ce premier roman augure d’une suite féconde.

ÉLIANE JUNOD,
L'Omnibus, 25 juillet 2014

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Violette, après quinze ans de solitude, se sent «conjuguée au féminin dépassé». Dans sa vie inconsistante surgit à l’écran un étonnant Antonio. Il lui fait vivre une passion qui, pour être virtuelle n’en est pas moins faiseuse d’émotions et d’espoirs. Elle réinvente une existence de femme comblée, mûrit des projets.
Catherine a une vie intéressante mais que l’approche de la cinquantaine truffe d’inquiétudes pour les ennuis imparables de l’âge. Mike, relation du web, pourrait être une distraction amusante quoiqu’il semble peu enclin à apprécier les discours philosophiques, simplicité de bon aloi pour une aventure sans lendemain!
Ce voyage en pays virtuel est d’une ironie cruelle et ô combien réjouissante. L’arnaque est fort bien montée et l’enquête pleine d’enseignements. L’auteur maîtrise parfaitement le style, soit qu’elle raconte Violette et le «ghetto silencieux pour les femmes de son âge» soit qu’elle parle de Catherine et ses citations de femme cultivée, soit qu’elle décrive l’arnaqueur et ses complices involontaires. Elle nous démontre que les fantasmes ont une vie  qui, pour n’être pas virtuelle, n’en existe pas moins et que la Toile recèle quelque danger pour les êtres sensibles et imprudents.

JULIETTE DAVID,
Suisse Magazine

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On s’intéresse à nous, notre cœur bercé par les vagues de l’Internet bondit au rythme des messages envoyés et reçus. Quand le virtuel prend corps dans notre cerveau, difficile de flairer l’arnaque. Dans Crois-moi, je mens, son premier roman, la journaliste suisse Nadine Richon décrypte ce phénomène en croisant le destin de quelques personnages amateurs de Facebook.
«Depuis que j’ai écrit ce livre, des personnes prennent contact avec moi et me disent avoir été piégées par de fausses déclarations d’amour. Des hommes, en particulier, vont très loin, allant jusqu’à dévoiler leur anatomie à l’écran; certains continuent des mois après à verser de l’argent en Afrique ou ailleurs pour empêcher ces images de filtrer dans leur vie réelle. L’un de ces hommes attend avec impatience sa retraite dans quelques semaines pour cesser d’alimenter une arnaqueuse qui menace de le dénoncer à son employeur», raconte la journaliste. Il est difficile de remonter la piste de ces escrocs du cœur tapis au fond des cybercafés. Pourtant, une plainte peut s’avérer utile car une collaboration existe entre policiers suisses et étrangers sur ce thème de la cyber-arnaque. Le site Prévention Suisse de la Criminalité énumère les différents types d’escroquerie sur internet – dont la «romance scam» – et donne des conseils avisés.
Violette et Catherine, les deux femmes européennes piégées dans le roman précité, ne sont donc pas de pures fictions. Sans dévoiler la trame de ce récit qui avance à la manière d’un puzzle en train de se faire, avec des soupirs, des moments d’allégresse et des doutes existentiels, disons qu’il décrit avec précision le délire qui s’empare des âmes glacées croyant trouver leur bonheur au coin du feu virtuel. Ces personnes ne sont pas simplement naïves ou déconnectées du réel. Elles peuvent avoir des diplômes, un bon travail, une vision professionnelle et sociale claire, comme en témoigne la triste affaire qui s’est abattue en août 2014 sur le maire écologiste de Baden, piégé par une jeune femme rencontrée sur Facebook. Même s’il ne s’agissait pas à proprement parler d’une arnaque, le chantage exercé sur ce haut personnage s’appuie sur des selfies dénudés et des chats érotiques. Ténébreuse, l’affaire n’est pas terminée sur le plan juridique. Le maire a été pris dans une tourmente médiatique et politique hors du commun pour avoir accordé, même brièvement, sa confiance à une quasi-inconnue.
Pourquoi des personnes intelligentes se laissent-elles aller à exposer leur intimité amoureuse et sexuelle après quelques messages échangés sur les réseaux? Nadine Richon évoque la puissance de l’écrit et la volonté d’y croire: «Les mots d’amour martelés à l’écran viennent se loger comme une balle perdue dans le cerveau des gens. Certaines paroles rassurantes et répétées ont l’effet d’une drogue. On s’abreuve au message d’amour comme à une source dans le désert, même si un signal plus ou moins conscient nous alarme sur la qualité de l’eau. Le signal est là, mais on l’ignore jusqu’au dernier moment. Cet instant ultime peut varier en fonction des personnes. Certains joueurs cessent d’y croire dès que leur partenaire exprime une demande financière. D’autres s’acheminent le cœur anxieux vers des guichets de transfert d’argent; l’imagination leur présente alors un amoureux en détresse qui un jour viendra les enlacer dans le monde réel», précise l’auteure.
Nadine Richon va plus loin: on ne peut pas exclure, selon elle, que cette liaison dégradée par l’argent ne devienne pour certains une forme d’amour consentie: «Si on accepte le marché, on peut ainsi entretenir à distance une relation économico-amoureuse qui occupe la zone affective du cerveau trop longtemps abandonnée». Son roman reste cependant un appel à la liberté. Il évoque avec une écriture soignée, aux accents hypnotiques, une situation délirante dont les victimes tentent de s’extirper pour rejoindre la terre ferme. La journaliste a pu entrer en contact avec deux arnaqueurs d’abord très méfiants puis enclins à lui raconter les arcanes de leur triste «métier». La littérature puise ici dans les profondeurs du réel mondialisé.

JEANNE ARTHUR, JSB Blog

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«Violette connaissait par cœur le visage d'Antonio, ses oreilles très collées, son long nez légèrement épaté, le grain de sa peau un peu grossier, sa nuque et ses épaules massives. Il lui était arrivé de ne plus bouger une heure durant, après certains messages, pour préserver la sensation cotonneuse créée par des mots qui faisaient émerger un monde verdoyant, chaleureux, inouï, la plage de Paul et de Virginie.»
La fable moderne tissée par Nadine Richon nous fait entrer dans le monde de Violette, secrétaire belge, et de Catherine, femme de financier genevois, toutes deux adeptes de Facebook.
Nadine Richon vit à Lausanne. Elle est collaboratrice à Unicom, le service de communication de l’Unil.

La Gazette, Média de la fonction publique

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Crois-moi, je mens de Nadine Richon, aux éditions suisses Bernard Campiche.
Pourquoi un étudiant du master LMA ne peut pas louper cette lecture? Parce que ça lui ferait découvrir à la fois un éditeur suisse ET une auteure suisse, bourrée de talent, drôle, glamour mais aussi impitoyable à l'égard de ceux qui nous pourrissent tous un tout petit peu la vie à leur manière... J'ai nommé: les réseaux sociaux. Lecture garantie Swiss quality.

CHARLOTTE MONNIER, ActuaLitté

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Entre le bagage en soute dont le poids est limité et le bagage en cabine dont le volume est limité, j’ai tout de même emporté le dernier Richon avec moi. Ce n’était, soit, pas «À la Recherche du temps perdu» à glisser dans ma valise-trolley mais chaque gramme et chaque cm2 comptent lorsque l’on part pour une semaine de croisière suivie de quelques jours dans la campagne brandebourgeoise. Mon mérite réside dans le fait que j’avais déjà goûté au 4/5 de Crois-moi, je mens dont la lecture ne m’a occupé que de Morges jusqu’à Gesundbrunnen (via Genève Aéroport et Berlin Schönefeld). Je vais donc faire le reste du voyage avec un livre consommé. Il me reste jusqu’à Rostock pour en faire la critique, je réserve la semaine de croisière à la lecture/correction de L’Affaire Julia. Canicule parano ne m’appartient déjà plus, il est aux mains des imprimeurs-accoucheurs.
Tous ces menus détails d’intendance de (presque) nantis n’ont rien d’incongru en préambule de la critique de «Crois-moi …». Nadine y évoque dans un style «Sagan faceboukien» une intrigue numérique. Deux femmes, Violette et Catherine, deux protagonistes dont la jeunesse n’est plus sur des modes différents, un mystérieux séducteur, le réseau social, un récit bien ficelé au dénouement rondement négocié, rebondissement léger et un peu de douceur aussi. Au rayon de ce qui ne m’a pas convaincu, il y a une lichette de bienpensance et son bla-bla rabâché mémère sur les bords. Je ne peux malheureusement pas entrer dans trop de détails, je risquerai de vendre la mèche. Il y a aussi un délire à propos de séries télé et quelques-unes des plus moisies, ça ne dure qu’un demi-chapitre et cela tient plus de la responsabilité de la maison d’édition qui aurait pu faire remarquer à l’auteur que l’on s’éloignait du sujet. Une très belle conclusion vient toutefois corriger cette maladresse. Dans mon assortiment de bémols, je trouve encore de l’anecdote perso sans grande importance par rapport à l’intrigue et une mise en abîme chancelante du genre «ce n’est pas moi, c’est elle», faite d’un demi «comme si». Certains trouveront ça mignon, ça titille un peu, ça picotouille comme une langue de chat avec son sucre acidulé, de la bonbonnaille qui se veut sérieuse. L’autrice n’est-elle pas en train de nous raconter et d’avouer publiquement une tentative de turlute extra-conjugale idéalisée? du vrai de vrai mais romancé?! Qu’importe, Nadine a suffisamment de métier et de références pour faire vivre ses personnages, pour déployer un univers nuancé et sensible. Je vous l’ai dit, du Sagan. La belle Mme Richon a aussi l’art de faire phosphorer son lecteur, mine de rien, sur la problématique de l’âge et de la séduction ou de la valeur intrinsèque du mariage. Elle y apporte des résolutions pleines de bon sens et d’empathie. Qu’il doit être doux de faire partie de ses proches.
Quelques belles formules, le regard nostalgique sur ce qui a été, la bascule de l’âge, l’extrême jeunesse, 45 ans, après la femme est vieille. Que Nadine se console, chez les gays on est vieux à passé 25 ans (28 car tout le monde ment sur son âge), après on est condamné à la transparence publique, thème développé autour du personnage de Violette. Catherine, la seconde protagoniste de «Crois-moi …», à défaut de retenir les ans, s’économise et prend grand soin d’elle-même au risque de ne plus vivre. Des promesses d’amour cybernétiques viennent l’entretenir dans ses chimères. Facebook, miroir aux alouettes ou réalité augmentée? C’est selon peut conclure le lecteur, il suffit de choisir ses amis virtuels, ses connaissances, avec le même soin que ses amis physiques.

Blog
de
FRÉDÉRIC VALLOTTON,

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Vertiges de l’amour

C’est une histoire d’amour bien de son époque. Une fable moderne, comme on dit. Violette est belge. Elle est très seule. Catherine, genevoise, aimerait pouvoir l’être. Elles ne se connaissent pas mais, comme beaucoup, rêvent du prince charmant. Elles vont le trouver sur Facebook. Il s’appelle Antonio pour l’une, Mike pour l’autre. Et Jordan pour ceux qui le connaissent vraiment. Ni Italien ni Américain, mais Ghanéen… Un premier roman qui, d’une belle plume, s’empare d’un phénomène contemporain et interroge: aimer est-il plus fort qu’être aimé?

ÉVA GRAU,
Femina

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Zoom tout d’abord sur le livre de Nadine Richon, intitulé Crois-moi, je mens, livre dont la couverture, Geneviève, est une photo de cinéma des années trente…
…Oui, absolument, c’est tiré du film La Huitième Femme de Barbe-bleue, d’Ernst Lubitsch, avec Gary Cooper et Claudette Colbert… Pourquoi? Parce que Nadine Richon aime, semble-t-il, autant le cinéma que les séries TV… Cette journaliste ne renie pas son métier dans ce premier roman, puisqu’elle ne s’est pas contentée d’imaginer une histoire autour de l’arnaque aux sentiments telle qu’elle se pratique de plus en plus sur le web, mais elle s’est documentée à fond sur la place de l’amour dans la société, sur Facebook et les réseaux sociaux, sur le couple, sur la morale, la justice et j’en passe…

Telle que je vous connais, Geneviève, vous voulez dire que toute cette bibliographie doit peser un peu, c’est bien ça?
…Un petit peu, je reconnais… …Mais ça a ses bons côtés quand l’auteur cite par exemple un écrivain et nous donne envie de le lire… …On sent bien qu’on est dans une fable, tout de même, une fable dont les protagonistes sont deux femmes, Violette, une Belge dans la soixantaine, très romantique, avec peu de moyens, qui craquent pour le bel Antonio, qu’elle découvre sur Facebook, et Catherine, qui elle est femme de banquier et qui aime bien butiner sur Facebook… …En face, vous avez l’escroc, l’escroc si on peut dire, et celui dont il usurpe la photo, le physique et qui n’est autre qu’un ancien acteur du porno…

…Et les victimes réunies réussissent à démasquer le tricheur, finalement?…
…Oui… La plus jeune, Catherine, est la moins naïve des deux, elle va entrer en dialogue avec lui, le démasquer, enfin le faire avouer et lui faire non pas la morale, mais en tout cas  la démonstration que son affaire ne va rien lui rapporter de bon… …Mais entre-temps, elle prend peut-être conscience de deux ou trois choses, notamment de la persistance du mythe du Prince charmant et de cette obsession de l’âme sœur et de la séduction, dont les femmes auraient tant de peine à se débarrasser…

…Qu’est-ce c’est? C’est une mise en garde, ce livre, Geneviève?
…Pas vraiment, je crois que c’est juste l’occasion de quelques constats désabusés et de réflexions un peu existentielles…

GENEVIÈVE BRIDEL,
«Quartier Livres», RTS «La Première», Journal du samedi

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Journaliste, Nadine Richon exploite suffisamment la Toile pour avoir eu envie d’en tirer autre chose que des dépêches d’agences: par exemple ce chassé-croisé amoureux, voire érotique, sur des sites de rencontres, à travers lesquels hommes et femmes poursuivent, dissimulés derrière l’écran, la quête éternelle du partenaire parfait en se croyant modernes, libérés, intéressants… Sans juger ni travestir, le style dévoile – dans tous les sens du terme – une réflexion vive et fine sur l’un des phénomènes de notre temps.

Marie-Claire Suisse

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Femmes au tournant

Deux femmes au tournant de l’âge s’inventent un prince charmant. Ainsi commence la «fable moderne» imaginée par Nadine Richon avec Crois-moi, je mens, son premier roman. Ni Facebook ni Twitter n’ont entamé la soif de conte de fées qui vient se lover au creux des solitudes. Bien au contraire. Mais les princes charmants n’existent pas plus à l’ère numérique qu’à l’époque des chevaliers en armure.
Avec un sens déjà bien rodé du portrait et de l’intrigue, Nadine Richon aborde ici la solitude au féminin, la force des chimères, la puissance de l’Éros à tous les âges de la vie et les chausse-trappes de la communication virtuelle.
Violette a soixante ans. Catherine en a quarante-neuf. Elles ne se connaissent pas. Violette vit dans une petite ville industrielle en Belgique. Catherine vit à Genève. Violette était secrétaire, «secrète secrétaire» comme elle le précise. Elle a été licenciée à quelques encablures de la retraite. À l’annonce des licenciements, elle avait participé au combat syndical. Pas tant pour elle, elle s’imaginait pouvoir tenir avec ses économies, mais plutôt pour ses collègues, plus jeunes, désemparés. Une fois les banderoles repliées, «elle avait été surprise par la rapidité de l’oubli où elle était tombée».
Catherine est femme de financier. Elle s’occupe, aussi. Elle milite pour l’extension du réseau piétonnier dans la ville. Elle aide de jeunes artistes, des écrivains dont les travaux l’intéressent. Elle élève ses grands enfants. Elle refuse de s’appesantir sur sa vie conjugale. Devant son miroir, certains matins, Catherine s’effraie toute seule. Sa jeunesse lui fait déjà des petits signes de la main, au revoir, au revoir…
Et Violette et Catherine vont céder aux charmes de la drague en ligne. Toutes deux vont succomber à la puissance des mots et assister à l’emballement de leur imaginaire érotique. Violette se métamorphose à distance pour le bel Antonio. Catherine, malgré ses garde-fous d’universitaire, se met à parler de Mike avec ses amis professeurs.
Voilà pour les prémisses. Car bien vite, la romancière va convier le lecteur par-delà l’écran. L’intrigue se noue alors et prend un nouveau relief. Jusque-là, de bref chapitre en bref chapitre, le lecteur écoutait se confier tantôt Catherine (qui s’exprime à la première personne) tantôt Violette (mise en voix par un narrateur). Et puis, un premier homme surgit. En chair et en sueur, égaré à l’autre bout de la planète, loin de chez lui et loin de lui-même surtout. Un autre homme s’invitera aussi dans la danse, un ex-acteur de porno, fatigué de se résumer à son entrejambe et qui s’apprête à changer de vie.
Comme dans toutes les fables, l’épilogue explicite le voyage parcouru. Descendus à terre après avoir chevauché leurs chimères respectives, tous les personnages ont l’humilité de poser le masque. Et si les contes de fées n’attendaient que cela pour advenir?

LISBETH KOUTCHOUMOFF,
Le Temps

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Pêche en ligne

D’abord il y a Violette, humble et paisible retraitée de soixante ans qui vivote dans une banlieue belge. Peu réjouie par son quotidien, cette romantique vit «sans grande intensité après un divorce depuis longtemps consommé». Un soir, alors qu’elle rêvasse en s’évadant sur Facebook, un bel inconnu se présente à elle. Elle répond timidement, puis, doucement, se laisse charmer par la fougue d’Antonio le Sicilien. Et au fil des échanges, les mots deviennent si chauds et les photos si excitantes qu’ils enflamment cette femme et revigorent sa fleur de l’âge.
Ensuite il y a Catherine, quarante-neuf ans, épouse et mère qui habite Genève. Une bourgeoise cultivée et sportive qui n’a rien à redire sur sa vie et qui, pourtant, redoute le cap de la cinquantaine: «Ce passage s’accompagne d’un sacrifice, celui de ma jeunesse en l’occurrence, qui se vide de son sang tel un taureau andalou.» Pour échapper aux sévices du temps, elle se distrait avec énergie et s’échappe sur le web et ses réseaux sociaux, où elle fait la connaissance de Mike l’Américain, un entrepreneur veuf et simple. Des échanges de plus en plus passionnés qui font miroiter à Catherine une nouvelle jeunesse.
Enfin il y a Jordan, vingt-quatre ans, Africain égaré à Kuala Lumpur. Fauché, ce petit génie de l’informatique à l’imagination fertile est un cybercriminel qui, à l’aide de profils fictifs, soutire de l’argent à des femmes seules, naïves et crédules… Le faux est l’ami du prêt.
À l’ère où Facebook, Twitter, Tinder et autres outils de socialisation règnent sur les rencontres, le premier roman de la journaliste Nadine Richon tombe à pic. Mêlant habilement personnalités multiples et objets de désir variés, elle traite d’un sujet brûlant:: l’honnêteté dans l’univers virtuel et désincarné. Un récit tendre et triste qui relève que sur la Toile tout le monde n’est pas net.

ALINDA DUFEY,
Vigousse

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Les promesses n’engagent que ceux qui y croient

Ils s’appellent Antonio,  Violette, Catherine, Jordan, Alexandre, Sacha, Simon, Mike. Ils habitent en Belgique, en Suisse, en Malaisie, en France. Ils ne se connaissent pas, mais sont reliés entre eux par un cordon ombilical virtuel: Facebook. En fait, le réseau social est le personnage principal du premier roman de Nadine Richon.
La journaliste lausannoise cisèle une fable moderne à mi-chemin entre le polar, la cybercriminalité et la quête éperdue de l’amour romantique en moins de deux cents pages. Avec une maîtrise subjuguante de la phrase percutante et de l’anecdote consternante, elle livre un récit efficace, poignant. Il se laisse d’ailleurs facilement dévorer. Et vite aussi. Au même rythme que l’info circule sur les réseaux sociaux. Si ce roman émeut, c’est qu’il nous plonge dans nos vies actuelles avec une sincérité crue. La sincérité des sentiments, celle des mensonges également.
Entre le romantisme désuet des films hollywoodiens des années 1940 et la brutalité de notre monde qui refoule tout un continent aux portes de notre opulence, elle ose l’interrogation sociale et nous pousse à la réflexion. Tout le propos est condensé dans un slogan: mentir pour s’en sortir. Se mentir à soi-même pour oublier sa condition d’esseulée dont la seule perspective est une mort lente qui ne sera plus adoucie par des bras virils, promesses d’étreintes. Se mentir à soimême encore pour céder aux promesses d’une escapade adultérine, qui viendra pimenter un quotidien bourgeois feutré et trop lisse. Mentir, toujours, pour se vêtir, se nourrir. Tous ses mensonges portent en eux un appel au secours vivifiant. Il est facile de se cacher derrière le filtre d’amour de Facebook pour soutirer des sentiments. Même celui qui tire les ficelles en bon délinquant affabulateur se laisse prendre au piège du mensonge tant répété qu’il se transforme en vérité, forcément frelatée. Nadine Richon ne dit pas si elle a expérimenté la demande en mariage blanc via le réseau. Elle donne néanmoins de jolis morceaux de sa vie: Facebook au quotidien, la course à pied, les séries télé, le cinéma. Et sa belle plume.

ANNICK CHEVILLOT,
24 Heures

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Privé
Nadine Richon
Un travail de dentelière

Un vaste écrin de verdure au cœur de Lausanne: c’est l’endroit idyllique que l’on découvre lorsqu’on pousse une porte en fer, discrètement encastrée dans un mur de pierre qui longe les hauts de la rue du Valentin. Quelques marches mènent à des jardins potagers où poussent les premières fleurs. Planté au milieu de cet îlot, un immeuble imposant et moderne, gardé sur sa gauche par d’immenses arbres qui forment un rempart contre le brouhaha de la ville. C’est là, dans un appartement acheté voilà plus de dix ans, que vit Nadine Richon, collaboratrice au service de communication de l’Université de Lausanne et ancienne journaliste à 24 Heures, L’Illustré, Télétop Matin et TéléTemps.

Premier roman

Jolie robe réalisée par une styliste française, leggings et ballerines, elle pratique la course à pied quatre fois par semaine et ça se voit. Si elle a une silhouette de jeune fille, elle refuse de dire son âge. À chacun ses coquetteries. Elle est née à São Paulo, au Brésil, d’une mère brésilienne et d’un père suisse qui travaillait pour Brown Boveri. La famille s’est installée à Vevey lorsqu’elle avait trois ans. C’est là qu’elle a grandi et c’est à l’université de Lausanne qu’elle a étudié la sociologie. Couleur turquoise, les meubles de la cuisine intégrée au vaste salon invitent au voyage. Sur les murs, des étagères et un millier de DVD de films et de séries, sa passion. Depuis le balcon, la vue sur les toits de la ville et le lac est magique. C’est ici, dans cette pièce lumineuse que Nadine Richon s’est mise au travail et a écrit «Crois-moi, je mens».

Écrire debout

Son premier roman raconte l’histoire de deux femmes: Violette, ancienne secrétaire et jeune retraitée belge esseulée, et Catherine, bourgeoise de Genève, mère de deux adolescents et épouse d’un financier qui, à quarante-neuf ans, aimerait bien pimenter sa vie. Toutes deux se font piéger par Jordan, un jeune homme un peu minable qui se fait passer pour Antonio, un Américain aux origines siciliennes, dans le but de soutirer le maximum d’argent à celles qui, sur Facebook, ont l'impudence de répondre à ses avances et de croire à ses promesses.
Le bureau de la Vaudoise, c’est la table familiale, installée près des fenêtres qui donnent sur les grands arbres. Elle a d’abord écrit un premier jet qu’elle a retravaillé durant «des heures et des heures». Chaque phrase est ciselée avec une minutie particulière, «le travail de réécriture, c’est de la souffrance». Elle a terminé son roman debout, son ordinateur installé sur le bar de la cuisine, car rester assise devenait trop douloureux. Une année d’écriture intensive, mais le matin surtout, durant les vacances, le week-end et les congés. Heureusement, son fils de dix-sept ans et son époux se lèvent tard: cela lui a laissé du temps. «Je me suis retranchée durant douze mois, mais j’ai assuré un minimum pour ma famille au quotidien.»

Travail et souffrance

Ce premier roman, cela fait longtemps qu’elle y pensait. «Quand on est journaliste, l’écriture n’est jamais très loin. Je voulais écrire un livre, mais je n’en avais ni le temps ni la motivation.» Nadine Richon raconte que c’est la mésaventure d’une de ses amies sur Facebook qui lui a inspiré l’histoire de Violette, transie d’amour pour le faux Antonio. «Mais j’ai également enquêté sur le monde de  Facebook». Songe-t-elle à un prochain livre? «Il y a quelques mois, j’aurais dit non, c’est trop de travail. Mais finalement on y prend goût.»



Ses trois objets

Châle noir
C’est ma mère qui l’a crocheté pour moi. Depuis deux ans, il m’a accompagné partout et j’ai toujours peur de le perdre. Je m’emballe dedans et je me sens bien.

Coffret Hitchcock
J’adore ce réalisateur dont je revois les films, sans m’ennuyer. Je suis passionnée par le cinéma. J’aime particulièrement l’âge d’or hollywoodien et ses acteurs merveilleux.

Baskets de course
Mon objet le plus précieux. Je cours quatre fois par semaine. J’ai fait le marathon de New York, ceux de Paris et de Lausanne

SABINE PIROLT,
Payot-L'Hebdo; Sélection. Les meilleurs romans de l'été

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Aux confins du cyberspace

Le premier roman de Nadine Richon, Crois-moi, je mens, emporte le lecteur dans le monde virtuel des réseaux sociaux. Cette fable moderne détonne avec la couverture du livre représentant Claudette Colbert et Gary Cooper, acteurs d’un autre temps. Même si le rapport semble anachronique, la thématique de l’amour est, elle, reconductible: «Quoi de plus passionnant que d’aimer ou d’être aimé?»
Nadine Richon raconte le quotidien de deux femmes à la recherche de l’amour sur «Facebook». Ces personnages évoluent sur ce réseau social en quête du prince charmant. Venant d’horizons différents, leurs destins vont se croiser sur la toile. Mais il faut se méfier des apparences… Dans ce monde désincarné, permettant les échanges mondialisés, se rencontrent des personnes sincères et des cyberarnaqueurs professionnels. Comment l’amour qui nécessite forcément une rencontre peut-il exister virtuellement?
Le roman s’interroge sur une thématique de notre temps où tout se passe sur la toile. Comme le sous-titre l’indique, l’histoire est une fable où l'auteure a voulu y insérer une morale. Sur internet, les identités sont malléables à l’infini et chacun peut s’y faire piéger. L’auteure adopte un ton léger, tout en insérant quelques critiques quant à ce nouveau mode de rencontre. Enrichissant son texte de références au cinéma, à la littérature et à la musique, l’auteure s’intéresse à la question de la virtualité. Le lecteur entre dès lors qux confins du cyberspace.

CARMEN STRÜBY,
La Liberté

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Liaisons dangereuses sur Facebook

Le premier roman de Nadine Richon frappe pile juste, dans cette zone d’étourdissement où les amours virtuelles se heurtent aux sentiments réels

Nadine Richon est une femme d’écrans. Journaliste, elle aime le cinéma avec passion et érudition. Geekette, elle alimente son profil Facebook à toute heure du jour et de la nuit. Dans la vraie vie, elle cache ses doutes et abîmes sous une frange joyeuse de fille toute simple. Mais outre les écrans, Nadine Richon a du cran. Son premier roman Crois-moi, je mens balance des observations qui sonnent terriblement juste. Et ses phrases épinglent nos errances sans états d’âme.
Le propos, justement. Violette est une sexagénaire belge un peu fleur bleue, forcément, avec un tel prénom, qui se sent «reléguée au fond de la classe, conjuguée au passé dépassé». Catherine, la Genevoise conquérante, arrive, elle, à la cinquantaine, courant sur un tapis de fitness à la poursuite de sa jeunesse et se parfumant à l’Heure Bleue de Guerlain, pour s’habituer déjà à l’odeur des combats perdus.
Toutes deux traînent sur Facebook,à la recherche d’une lueur, d’un ailleurs. Toutes deux tombent ainsi sur Antonio, un séducteur au verbe fleuri et au membre facilement exhibé en photo. L’amour, le jeu, les montées de sève, les faux-semblants, les promesses: les relations sur réseaux sociaux ont souvent le goût du vrai. Les deux femmes si dissemblables finissent par se prendre dans les mêmes rets, captives surtout de ces rêves qu’elles se sont si solitairement tissés. Chacune doit ensuite trouver son propre chemin pour réorganiser sa réalité en fonction des blessures virtuelles – qui font mal quand même. Il n’y a pas que les préadolescents qu’il faudrait mettre en garde contre les chimères de Facebook
Les lecteurs romands connaissent la plume de Nadine Richon, pour l’avoir lue à la rubrique culturelle du quotidien Le Temps, il y a quelques années. Puis la journaliste a pris ses quartiers au service de communication de l’Université de Lausanne, où elle traite souvent de matières plus scientifiques.
Ce premier roman laisse s’épanouir une écriture différente, riche, mordante et alerte – une jubilation. Sociologue de formation, l’auteur campe ses personnages à coups d’observations fines, où chacun retrouve un trait noté chez tel voisin ou ami. S’y mélangent avec bonheur les références cinématographiques qui sonnent du sel au banal, la passion du moment pour la course à pied et le ventre plat, les tribulations de couples trop complices pour être ardents, l’attrait dans les pays pauvres pour l’ennui des riches… Un roman très contemporain.

RENATA LIBAL,
Le Matin-Dimanche

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Tout sourire, semblant même ne pas encore y croire tout à fait, Nadine Richon raconte l’aventure de son premier livre, un roman, «une fable moderne», comme il est précisé sous son joli titre: Crois-moi, je mens. «Il y a environ deux ans, j’avais écrit à Serge Doubrovsky, l’auteur de Fils, parce que j’aime vraiment tous ses livres. Il m’a répondu qu’il avait trouvé ma lettre très belle et puis il m’encourageait à écrire, me disant même à la fin: «Vous êtes écrivain, allez-y!» Travaillant depuis une dizaine d’années au service de communication de l’Université de Lausanne, ayant oeuvré entre autres journaux pour L’illustré, la journaliste n’avait jamais vraiment imaginé écrire autre chose que des articles. «Après une telle réponse, j’ai bien dû m’y mettre!»
Elle y consacre alors tout le temps libre que lui laissent son emploi à plein temps, sa vie d’épouse, de mère d’un gymnasien, et d’autres passions comme celle qui la fait courir quatre fois par semaine. «J’ai encore passé les vacances de Noël sur la réécriture. Je ne l’ai pas du tout écrit d’un jet.
Au final, le roman coule comme la rivière du temps, porteuse de quelques transports amoureux et du rêve d’aller à Rome. Quelques mois de la vie de deux femmes, de quelques hommes aussi. «Il y a de moi dans tous les personnages, même l’acteur porno!» Deux histoires d’amour dans la lumière bleu blues de la fenêtre Facebook. «Petit à petit, le réseau social est devenu lui aussi un personnage. J’avais envie de parler de quelque chose de contemporain, besoin que ce soit ancré dans l’actualité, parce que je n’aime pas les romans qui ont l’air inventés. J’aime être en prise avec le réel, le vécu, même s’il y a aussi plein de fantasmes.»
De ses années d’études en sociologie à Lausanne (avec notamment des cours de François Masnata, qui marquera durablement la gauche de ces années-là), l’écrivain a gardé le goût du savoir et de la critique. «Je me demande: «Qu’est-ce que l’amour, hier, aujourd’hui, demain?» Comme Facebook, c’est un peu trivial, j’ai eu besoin des philosophes. J’ai lu beaucoup de choses {elle donne la bibliographie, ndlr}, j’ai réfléchi. J’ai même glissé des citations en essayant de faire en sorte que ça reste fun!» Ça l’est. Passionnée de cinéma, nourrie à la cinémathèque de Freddy Buache («Je l’ai rencontré un jour à Locarno, il est devenu un ami») et à la télévision de son enfance («Cary Grant et compagnie, Gary Cooper… Ça vient de là!»), elle confie ses meilleurs souvenirs à ses personnages comme elle leur prête sa colère après un fait divers dramatique (l’assassinat d’Adeline), ramenant le lecteur ici et maintenant. «Je dois me désintoxiquer de Facebook», juge un personnage qui se souvient alors de quelques mots du poète Max Jacob: «Le courage porte bonheur.»

JEAN--BLAISE BESENÇON,
L’Illustré

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Dans un monde de plus en plus virtuel, donc de plus en plus désincarné, les êtres humains restent cependant des êtres qui ont besoin d’aimer et d’être aimés. Seulement l’amour suppose qu’il y ait rencontre.
Parmi les possibilités de rencontres qu’offrent les nouvelles technologies de l’information, il y a les sites de rencontres, bien sûr, mais également les réseaux sociaux tels que Facebook, qui offrent de grandes possibilités.
Les personnages de Crois-moi, je mens, le roman de Nadine Richon, évoluent sur ce réseau social.
Violette habite la Belgique. Elle est secrétaire. Mais elle a été licenciée. En songeant aux autres, elle s’est investi dans une lutte syndicale pour un plan social qui va s’avérer tout juste acceptable. Divorcée depuis quinze ans, sans enfants, elle vit seule. Elle lit. Elle aime au cinéma «les sentiments, les héros poignants, mais aussi les méchants bourlingueurs». Elle se découvre un goût pour le dessin. Facebook est le lieu où elle partage «son trait de crayon avec un groupe d’amis virtuels».
Antonio fait un jour irruption dans sa vie sur ce réseau social. Il lui demande de faire sa connaissance. Sa vie en est changée. Elle recommence à s’aimer elle-même. Elle voit en ce quinquagénaire d’origine sicilienne un futur amant qui ne lui a rien celé de son corps. Car il a fini par lui envoyer en pièce attachée «une photographie exhibant son sexe érigé».
Catherine habite Genève. Son mari travaille dans la finance. Ils ont un grand fils, qui fait des études supérieures. Ils n’ont pas de soucis pécuniaires. Ce sont des nantis. Ils ont d’ailleurs un chalet auquel ils peuvent monter quand l’envie leur en prend:
«Notre famille appartient aux heureux qui savourent les bienfaits d’une Suisse enchantée où l’on hérite, presque sans effort, d’une résidence secondaire dans un paysage vert et bleu sorti d’une toile de Ferdinand Hodler.»
Mais, il y a un mais. Au seuil de la cinquantaine, Catherine souffre de constater sur elle des ans l’irréparable outrage, bien qu’elle s’entretienne au fitness et qu’elle y ait découvert un programme de «randonnée vallonnée». Aussi lorsqu’elle fait la rencontre de Mike sur Facebook  finit-elle par être flattée que cet homme lui adresse des poèmes, dont elle n’est pourtant pas sûre qu’ils soient de lui. Elle reste donc sur ses gardes.
Le point commun entre ces deux femmes est qu’elles ont reçu toutes deux un message privé de la part d’un homme qui s’est montré très intéressé par elles et qui, au fil des conversations, a eu le don de susciter en elles de sérieux fantasmes. Au point de leur donner envie d’une rencontre réelle et charnelle. Qu’il s’agisse d’Antonio ou de Mike, cet homme, objet de leurs fols désirs, se révèle avoir peu d’activités sur son mur et avoir peu d’amis...
En dessous du titre de ce roman, entre parenthèses, se trouve un sous-titre: Une fable moderne. Et c’est bien d’une fable dont il s’agit, avec sa morale, également moderne.
En exergue de son livre, Nadine Richon a mis cette citation d’André Comte-Sponville:
«Quoi de plus passionnant que d’aimer ou d’être aimé?»
Mais, dans un cas, comme dans l’autre, encore faut-il se méfier des apparences...  L’avertissement vaut autant pour les hommes que pour les femmes.
Nadine Richon a adopté pour cette fable le ton qui convient, plein d’autodérision de la part des personnages. Elle a ainsi des bonheurs d’expression qui ne peuvent que ravir le lecteur.
Elle dit de Violette:
«Pas suffisamment belle, jadis, et déjà trop vieille aujourd’hui, elle s’était définitivement crue inapte au service amoureux [...]»
Elle fait dire à Catherine:
«Ma pomme se ratatine, ma figure se fissure, ma jeunesse s’accroche encore, mais sa décision est prise, définitive: demain, elle se barre...»
Aussi puis-je me permettre de dire au futur lecteur de cette fable:
«Crois-moi, je ne mens pas. En la lisant, tu t’instruiras peut-être, mais, sûrement tu ne t’ennuieras pas.»

Blog de
FRANCIS RICHARD

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«Du réel sonnant et trébuchant»

Dans son premier roman Crois-moi, je mens, sous-titré Une fable moderne, Nadine Richon se délecte des mots. Elle les aligne comme des perles, composant une poésie rythmée pour habilement se mettre dans la peau des autres. L’auteure lausannoise donne relief et profondeur aux profils qu’elle anime, des êtres transfigurés autant que révélés par le magicien Facebook – protagoniste à part entière ou simple toile de fond de rencontres aussi virtuelles que réelles? Le récit se joue des frontières.
Les prénoms intitulent les chapitres. Jolie idée, comme empruntée au cinéma Nouvelle Vague, mais qui souligne aussi l’aspect catalogue de fiches du réseau social. Violette, secrétaire précocement retraitée, divorcée et désenchantée, se nourrit des images de ses films fétiches. Catherine, bourgeoise, mariée, cultivée et un brin pédante, jongle avec ses classiques: Nietzsche, Véronique Sanson ou Le Corbusier. Peau noire, hideux masque blanc, Jordan-Mike-Antonio, ponctuellement secouru par Daniel, surgit avec malice dans les existences engluées de ces dames. Nadine Richon raconte une même histoire à plusieurs voix. Pour mieux troubler le lecteur, elle conjugue première et troisième personne ou convoque des amis de la vraie vie dans le déploiement de son drame sentimental kaléidoscopique et sociologique.
Clique, like et puis claque. Les fantasmes de liaison, le réveil de la chair autant que la chair domestiquée s’entrechoquent autour d’un Arsène Lupin du numérique et d’une star du porno sur le retour. Quand les uns sont sages, ils semblent se transmuer en rabat-joie étriqués voire pingres, face à la douce prodigalité démente des autres. Une étonnante mise en scène des ivresses que procure le carrousel Facebook.
Non sans faire la part belle aux séries télévisées dont les figures fictionnelles «colonisent» celles du roman, les pages sincères et généreuses égrènent un florilège de références. En filigrane de ses personnages, on peut ainsi lire les affinités intellectuelles et culturelles de l’auteure. Cinématographiques, philosophiques, littéraires ou musicales, ces nombreuses insertions sont autant d’occasions, pour elle de questionner l’être et le néant. Si, dans son livre, Nadine Richon se dissimule par la fiction et son «goût des autres», qui sait si elle ne s’expose pas réellement à ses amis sur le fameux réseau bleu...?

SOPHIE NEDJAR,
Le Courrier

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Violette et Catherine ne se connaissent pas. Chacune de son côté, elles sont engagées dans une relation virtuelle tourmentée. Aux confins du cyber­espace, leurs destins vont se croiser. Digi­talisée, pimentée, la vie quotidienne prend la forme d’une fiction collective tissée sur Internet. Aussi différentes soient-elles, ces deux femmes prolongent le rêve du prince charmant dans les échanges mondialisés de notre temps.

Illustration de couverture:
«La Huitième Femme de Barbe-Bleue»
(Bluebeard’s Eighth Wife), de Ernst Lubitsch,
avec Gary Cooper et Claudette Colbert, 1938,
© FIA / Rue des Archives, Paris

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