camPoche 89


MICHEL BÜHLER

L'Autre chemin

Chrniques parues dans «Résistance et dans «Le Courrier»
2019. 256 pages. Prix: CHF 16.–
ISBN 978-2-88241-446-5



Biographie

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L’Autre Chemin de Michel Bühler chez camPoche

«Peut-être ailleurs, ou plus tard, ou plus loin, je trouverai l’autre chemin.» Ces chroniques, c’est dix années de votre vie, Michel Bühler, où l’engagement occupe une place de choix. Elles sont rythmées par le bruit sourd et agaçant des éoliennes que des promoteurs veulent ériger sur la terre jurassienne, cette terre où vous avez planté des racines adventives et qui vous est si chère. Ces promoteurs, vous avez une dent contre eux.
Vos chevaux de bataille sont nombreux et vous les défendez bec et ongles. Ils ont nom: centrale nucléaire de Kaiseraugst – pas construite grâce à des «presque traîtres à la Patrie» dont vous étiez – Guatanamo – la honte d’un pays que l’on dit civilisé – la Palestine, les accords de Dublin, l’affaire Novartis, le Gripen, les Boat people, les émigrés… La liste est très loin d’être exhaustive, hélas!
À vous lire, le désespoir est sur le seuil, cogne à notre porte. Vous nous secouez. Nous, citoyens lambda, nous zappons. Une protection pour ne pas être écrasé par des réalités qui nous submergent? Un tsunami d’images, de mots d’un monde en déliquescence. Bon, vous y mettez de l’humour! Ça aide! Vous ne vous contentez pas de crier votre colère dans vos chansons, dans vos écrits, vous parcourez la planète. Vous vous investissez dans des projets qui tendent à rendre leur dignité aux plus humbles.
Vous, le collègue dont j’avais repris la chambre au Brassus, n’avez pas enseigné longtemps. Vous avez tracé votre propre voie, votre propre chemin. Chapeau bas, Michel Bühler! Vous êtes de notre terre, mais plus encore de la Terre. Cette Terre saccagée, pillée, exsangue pour le pofit d’une infime minorité. Courageux, vous l’êtes infiniment. Dans la lignée de ceux et celles qui se lèvent contre la violence, l’injustice, la liberté foulée aux pieds. À l’instar de Yvan Leyvraz de Saint-Cergue parti au Nicaragua afin de participer à la révolution qui promettait la santé, l’éducation, la réforme agraire. Et tombé à trente-deux ans dans une embuscade.
«La solidarité est la tendresse des peuples» chante le poète Tomas Borge. Et il y a cette phrase de Nikos Kazantzakis qui vous accompagne depuis l’adolescence. «J’ai dit à l’amandier: frère parle-moi de Dieu. Et l’amandier a fleuri.» Mots sublimes dans leur simplicité. Michel, vous avez choisi un autre chemin. Des jeunes vous emboîtent le pas.
Ces chroniques sont parues dans Résistance, la revue du POP et dans Le Courrier de 2008 à 2018. Elles sont sorties ce printemps chez camPoche.

ÉLIANE JUNOD,
L'Omnibus, vendredi 19 juillet 2019, No 673

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Révolte et engagements contre les scandales du monde

Dix ans de chronique de Michel Bühler dans différents journaux sont réunies en un ouvrage

Beaucoup de nos lecteurs auront lu les textes incisifs de notre ami Michel Bühler soit dans Résistance, le journal du POP vaudois, soit dans Le Courrier. L’une des premières chroniques, parue en mars 2008, résume bien une partie des engagements de cet homme en état de révolte permanente: l’opposition à l’intervention américaine au Vietnam, le refus d’une centrale nucléaire à Kaiseraugst, le soutien aux objecteurs de conscience, la participation aux défilés contre la guerre de Bush en Irak, la défense couronnée de succès des 523 demandeurs d’asile que le canton de Vaud allait renvoyer, la lutte pour une agriculture sans OGM. À cela s’ajoutent les séjours en Palestine et la condamnation de l’occupation israélienne, les attaques frontales contre des sociétés comme Monsanto ou Novartis. «Leur moteur, c’est l’égoïsme, leur religion, la cupidité», écrit-il dans l’une de ces formules qui font mouche. Il y a aussi les combats de proximité, par exemple contre les éoliennes dans le Jura, auxquels on n’est pas obligé de souscrire… Le leitmotiv de Michel Bühler, c’est la condamnation du «capitalisme sauvage», du «libéralisme mondialisé», de la «main invisible du marché», qui provoquent chômage dans les pays riches et misère dans les pays pauvres. Son combat est aussi culturel, notamment contre «l’américanisation» et l’appauvrissement qu’il induit, en particulier dans le domaine de la chanson qui est le sien. Il dit son respect pour les poètes, au premier desquels il place Aragon. Il exprime aussi son amour pour son Jura vaudois natal.
Comme Michel Bühler aime et promeut le débat démocratique, nous le contredirons sur un seul point. Dans une chronique parue dans Résistance en août 2008, il attribue les horreurs nazies (dont son père lui a montré des photos alors qu’il était enfant), à la «guerre», alors qu’elles sont le résultat de la monstrueuse idéologie du régime. Et c’est bien – hélas pour le pacifiste absolu qu’il est que je respecte – par la guerre et les armes que les Alliés l’ont mis à terre, non en agitant des rameaux d’oliviers. Son antibellicisme radical ne l’empêche par ailleurs pas d’exprimer son admiration pour les femmes engagées dans la guérilla salvadorienne.
Ici ou là, on sent chez lui quelque chose de désespéré devant l’échec de beaucoup de ses espoirs. Ainsi des révolutions du printemps arabe: «Tunisie, Égypte, Syrie, à chaque pas l’espoir semble s’éloigner». Mais il ajoute: «A-t-on pour autant le droit de cesser d’espérer?» et encore: «Au contraire, espérer toujours, c’est garder allumée une bougie au plus profond des ténèbres». Et de mettre en valeur des ONG humanitaires actives en Afrique.
On le voit, les chroniques de Michel Bühler, c’est aussi un style, vivant, efficace, journalistique. Il aime les phrases courtes. Il interpelle le lecteur. Il recourt au dialogue. Il utilise volontiers le point d’exclamation. Il insère parfois dans ses textes des extraits de ses poèmes ou de ses chansons. En bref, ses chroniques valent non seulement pour le message qu’elles délivrent, mais aussi par leur ton. On les (re)lira donc avec intérêt et plaisir. Elles témoignent de son don d’écrivain qu’il met au service de ses engagements.

PIERRE JEANNERET,
Gauchebdo, No 24

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«À suivre sa propre route
À sans cesse dire non
À ces foules qui n’écoutent
Que les donneurs de leçons
On apprend tout ce qu’il en coûte,
Restent peu de compagnons.
Je suis celui qui s’écarte
Je suis celui qui s’en va
Toujours en dehors des cartes
Toujours rebelle à vos lois
Il faut demain que je reparte
Nous vivons comme à l’étroit
Peut-être ailleurs, ou plus tard, ou plus loin
Je trouverai l’autre chemin»

Michel Bühler s’est toujours méfié des autoroutes et de ces voies qu’on dit toutes tracées. Et s’il lui est arrivé d’en emprunter quelques-unes, ce n’est jamais que pour mieux, en connaissance de cause, en dénoncer les effets pervers.
Auteur compositeur, interprète, romancier, essayiste, peu importe finalement quel costume il endosse: Bühler ne supporte ni l’injustice ni le mépris des puissants, et encore moins le silence, assourdissant, de ceux qui sont rentrés dans le rang. Alors, après l’avoir chanté pendant un demi-siècle, écrit et décrit à travers une bonne dizaine de romans et/ou de pièces de théâtre, le voici, inlassable, qui continue de battre le fer. Le bouquin qu’il publie aujourd’hui chez Bernard Campiche, son éditeur de toujours, est un recueil de chroniques parue entre 2008 et 2018 dans Résistance ainsi que dans Le Courrier de Genève. Chacune des quelques 250 pages qu’il comporte est un appel au refus, un cri de révolte. Bühler a vu les usines fermer et les ouvriers contraints de quitter les villages bientôt transformés en cités-dortoirs. Il a parcouru le monde, du Guatemala à l’Algérie, de l’Argentine au Burkina Faso, de la Palestine à la Roumanie, il est allé partout où la terre, et avec elle les hommes, les femmes et les enfants saignent. Il y a perdu des compagnons de route, il en est revenu plus convaincu que jamais de ne jamais renoncer, de ne jamais se taire. Et dit:

«L’espoir c’est plus fort que la mort
La fleur qui perce le goudron
Le soleil qui s’lèv’ra encore
Sur les fûts rouillés des canons
C’est cette flamme qui vacille
Ce feu que je tiens dans ma main
Fragile et fort comme ma vie
C’est tout ce qui me fait humain
L’espoir»

ROGER JAUNIN,
«Vigousse», «Les Copains d'abord»

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Un politicien bien ancré à droite me disait l’autre jour, entre condescendance et ironie: «Toi dont les convictions n’ont pas changé depuis notre jeunesse, tu n’en as pas marre d’être éternellement dans le camp des perdants? N’as-tu pas le sentiment de t’être trompé toute ta vie?»
Sur le moment, je n’ai pas su quoi rétorquer. À la réflexion, voici ce que j’aurais dû répondre

La première fois que j’ai manifesté, c’était pour marquer mon opposition à l’intervention américaine au Viêtnam. Tu nous traitais de gauchistes, d’ennemis de l’Occident et de la démocratie. Oserais-tu maintenant soutenir que cette guerre n’était pas une saloperie, inutile et cruelle ? Entre nous :
j’avais raison.
Je me souviens d’un samedi à Kaiseraugst, là où tu voulais implanter une centrale nucléaire, indispensable au pays ! Nous étions des milliers à dire non. Tu nous accusais de vouloir mettre à bas l’économie, nous étions de mauvais Suisses, des traîtres à la Patrie ! Kaiseraugst ne s’est pas construite. Pourtant le pays n’est pas ruiné. J’avais raison.
J’ai témoigné plus tard au procès d’un objecteur de conscience. Pour toi, ces idéalistes préparaient le lit des hordes barbares venues de l’Est, et s’apprêtaient à livrer nos femmes aux violeurs de toutes sortes. Maintenant, l’objection de conscience est admise, les convictions différentes respectées. Désolé mais, là aussi, j’avais raison…
… La dernière fois que j’ai rejoint des protestataires, c’était pour suivre un cours de fauchage, pour être prêt au cas où Monsanto et toi-même parveniez à imposer les OGM dans nos champs. Il est un peu tôt pour juger, mais je crois hélas que le temps dira que j’ai eu raison.
Cela dit, mon vieux, si tu as besoin de conseils, n’hésite pas à me rappeler !

MICHEL BÜHLER

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