ALEXANDRE VOISARD

LE POÈTE COUPÉ EN DEUX

Un roman à bâtons rompus

2012. 176 pages. Prix CHF 32.–
ISBN 978-2-88241-308-6



Biographie

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Manifestations, rencontres et signatures

Index des auteurs

À petite touches, l’auteur revient sur les méandres de sa jeunesse de rebelle. La vie était dure, l’argent rare et il fallait nourrir six enfants. Les «Anecdotes» racontent quelques événements parfois assez peu glorieux d’un jeune homme qui, au grand dam de sa famille, ne sera «que» poète et écrivain.
Le livre raconte combien, au travers des incompréhensions et des difficultés de l’existence, demeure ce lien intangible qui le lie à son père. Avec des souvenirs et des regrets, l’auteur glorifie cet homme à qui il doit tant et à qui il n’a pas su parler quand il était encore temps.

JULIETTE DAVID
, Suisse Magazine

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Au moment des luttes pour l’indépendance du canton du Jura, dans les années 1970, les poèmes d’Alexandre Voisard ont rassemblé les espoirs de tout un peuple qui les proclamait par cœur. Il a par la suite occupé des fonctions au sein du nouveau gouvernement. Aujourd’hui, à quatre-vingts ans, le «poète coupé en deux» s’est éloigné de la politique. Dans ce «roman à bâtons rompus», il dessine en petites proses légères, parfois mélancoliques, souvent drôles, des souvenirs d’enfance, des regrets et des désirs, la mémoire familiale. Le livre s’achève par une lettre au père, une réconciliation posthume, affectueuse et lucide. L’art de Voisard – sens de la litote, sentiment de la nature, humour, concision – se retrouve entier dans ce «roman» vrai.

ISABELLE RÜF,
Le Phare

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Des hauts et des bas

Une suite d’anecdotes, de souvenirs. Des «glanures», écrit Alexandre Voisard en avant-propos. Où il explique le titre: d’une opération de 1986, il a gardé une cicatrice à travers l’abdomen. «Mais on vous a coupé en deux!», s’exclama plus tard une «accorte personne» en la découvrant. Comme un symbole d’un poète tiraillé «entre le haut et le bas».
Les brefs textes du Poète coupé en deux oscillent entre ce pôle. Aux souvenirs d’enfance, où la figure du père est très présente, aux réflexions sur la musique et les mots succèdent des anecdotes toutes simples, jusqu’au pipi et caca. À quatre-vingt-un ans, Alexandre Voisard se retourne sur son passé sans en occulter des versants triviaux. Qui n’auraient pas grand intérêt s’ils n’étaient contrebalancés par de riches envolées: «J’en ai désormais la conviction: les couleurs (et les poissons) font certes rêver, mais ce sont les mots (et les oiseaux) qui font voyager.»

ÉRIC BULLIARD,
La Gruyère

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Cocottes, femmes, seins, fantômes… Père

Sorti tout juste de presse, Le Poète coupé en deux, Un roman à bâtons rompus, d’Alexandre Voisard, se lit d’une seule traite.

Titre dicté par les circonstances de la vie d’Alexandre Voisard ainsi que par, explique-t-il, le ressenti d’un déchirement entre deux pôles (des aspirations élevées et une trivialité), son dernier livre arbore une couverture un peu trop pétante à son goût. Elle est néanmoins très parlante. On ne dévoilera pas l’anecdote qui a dicté cette coupure en deux illustrée par des cartes à jouer, le lecteur s’en délectera d’entrée de jeu, dans les premières pages de l’ouvrage qui, comme son sous-titre l’indique, propose «à bâtons rompus» une somme d’écrits très courts, sans ordre chronologique existentiel, dépassant rarement les deux pages, voire se contentant au minimum de quelques lignes, jusqu’à aboutir à l’exception finale. Cette dernière est une lettre émouvante adressée à son père. «Je l’ai écrite, dit-il, à mes quatre-vingts ans, c’était à l’usage de mes proches et je me suis dit que ça pouvait trouver une place dans ce livre-là, ça fait même une espèce de point d’orgue.»

L’épine au cœur

Au fil de pensées, d’anecdotes, d’annotations ou de citations rapportées, une émotion forte sourd au gré de l’évocation récurrente du père, vivant ou disparu. Dans ce petit livre, il n’y a pas de solution à un éventuel secret, à un non-dit qui affleure parfois se rapportant à cet homme. «Le mystère est questionnement. Le mystère demeuré mystère est une épine au cœur», écrit Voisard. À la curiosité de la journaliste, il renvoie les mots de la «discrétion totale». «Depuis le moment où moi je me suis émancipé dans le mariage, narre-t-il sur le ton sage du conteur, je suis devenu aux yeux de mon père quelqu’un de respectable. Il ne se serait jamais permis de violer cette intimité. J’osais le questionner sur des choses, pas forcément domestiques, mais inversement lui était très discret vis-à-vis de moi. On ne s’est pas ouverts l’un à l’autre, dans mon âge d’homme en tout cas.»

— Comment ce livre a-t-il été fabriqué? Ces pensées, ces anecdotes, comment ont-elles été répertoriées?
— Quand j’ai écrit mon autobiographie, Le Mot Musique ou l’enfance d’un poète (paru en 2004), j’ai laissé tomber beaucoup de choses, beaucoup d’anecdotes qui seraient venues grossir le volume et compliquer l’histoire, mais néanmoins ça restait proche de moi, je les avais en moi, je me suis dit que je les reprendrai, mais je ne savais pas sous quelle forme. En tout cas, certaines de ces anecdotes qui sont des confessions autobiographiques authentiques sont venues comme ça, au fil du temps, je les transcrivais, j’essayais de les raconter au premier degré, le plus simplement possible. En dehors de ça, ou entre, ce travail d’inventaire, de cheminements de jeunesse – je suis un être intuitif, sensitif – des réflexions me venaient sur le roman, mon attitude dans la vie, la vie quotidienne (…) C’est un autre portrait de moi-même que je donne là, c’est un supplément à un livre préexistant, ça complète le tableau, y compris mon embarras pour les cocottes en papier ou des choses comme ça, qui sont des annotations, comme des travellings de cinéma qui se posent tout à coup sur un détail, un décor, le détail d’une main, d’un personnage… Ces petites réflexions ont panaché les confessions que j’avais à faire.

— Dans votre expression, votre poésie, il y a une communion avec la beauté naturelle, les fleurs sont nommées sans détour, toutes les réalités… Bref, la vraie question serait, et Dieu dans tout cela?
— Oh moi, j’ai une foi de charbonnier, je ne suis pas un militant de l’adoration divine. Je crois qu’on en a besoin… Moi, j’ai besoin de cette transcendance, je ne pouvais imaginer qu’il n’y a pas quelque chose qui nous attire mystérieusement, quelque chose qu’on ne connaît pas, qui nous invite tout le temps, constamment, au dépassement…

— Y aurait-il quelque chose après la mort?
— Je n’en sais rien. Je pense, oui, qu’il se passe quelque chose avec nous, après ce qu’on appelle la mort. Mais, de quel ordre?… Je n’y comprends rien et je n’ai pas envie d’imaginer quelque chose, c’est pour ça dans le fond, moi ce qui m’intéresse le plus, c’est le réel.


Si Le Poète coupé en deux se lit passionnément et d’une seule traite, son créateur le considère quant à lui comme un roman fait de discontinuité, voire de heurts, et qui peut se consulter dans le désordre. Ce roman qui n’en serait pas un s’accompagne d’ailleurs, à la fin, d’un inventaire ludique et alphabétique selon des mots choisis par l’auteur tels que: anecdote (il y en a sept), caca (deux), cocottes (un), fantômes (une), femmes (quatre), fusil (un), musique (six), miettes (un), seins (quatre), viande (deux), prière (un), secrets, etc. jusqu’à cette page 141 qui, dérogeant à l’amusante liste, annonce Lettre à mon père qui ne m’a connu qu’en chenapan et en père de famille, un texte d’une petite dizaine de pages. Quelques morceaux choisis:
Portrait: «À voir les portraits photographiques de mon père, jeune instituteur de vingt-cinq ans, je lui trouve une étonnante ressemblance avec le Rainer-Maria Rilke du début du siècle. Plus tard, photographié dans la force de l’âge, il aura un certain air d’Errol Flynn, acteur américain de l’époque qui incarna Robin des Bois. Pur fantasme, peut-être. Mais quels troublants transferts…» Page 45
Mots, 1: «Soudain mon père s’exclamait: “Oh! celui-là, ce taborniau…” Et aussitôt ma stupéfaction (muette) d’enfant.» Page 36
Mots, 2: «J’en ai désormais la conviction: les couleurs (et les poissons) font certes rêver, mais ce sont les mots (et les oiseaux) qui font voyager.» Page 127
Cocottes: «Je n’ai jamais su faire des cocottes en papier. J’en ai été longtemps navré.» Page 51

PASCALE STOCKER,
Le Quotidien jurassien

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J’ai voulu faire. J’ai fait. J’ai omis de faire. J’aurais pu faire autrement. Ne rien faire aurait été la pire illusion. Faire son chemin. Faire sa pelote. Faire sa vie, oh! Ai-je entrevu un chemin de Damas? Mais où? Mais quand? Il m’est arrivé, ayant fait, de défaire. Je n’ai jamais défait sans avoir fait. Je ne me suis pas fait d’amis chez ceux qui disent «laissons faire les choses». J’ai tourné le dos.

ALEXANDRE VOISARD